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Haïti et Dieu : une attente vaine

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Repenser le rôle de Dieu dans le changement d’Haïti

Par Jean Carmy Félixon

La situation d’Haïti s’aggrave. Le marasme prend de l’ampleur chaque jour, et les listes des victimes s’allongent. Selon un rapport de l’ONU, publié le 7 janvier 2025, en 2024, la violence des gangs en Haïti a causé la mort d’au moins 5.601 personnes. On dénombre également 2.212 blessés et 1.494 enlèvements. On peine à trouver un mot pour décrire l’horrible situation de terreur qui règne en Haïti.

En même temps, les prières et autres actes religieux se multiplient un peu partout. Les intercessions en faveur d’Haïti ne manquent pas. On prie Dieu – le Dieu de la Bible –, on prie les saints. Mais, contrairement aux attentes de plus d’un, Dieu n’intervient pas, ou du moins n’intervient pas comme on le souhaiterait. Dans l’intervalle, plusieurs lieux de culte sont fermés, tandis que d’autres ont été vandalisés, pillés et incendiés. Et l’on se demande : quand est-ce que Dieu va intervenir pour changer le pays ? 

Plusieurs facteurs s’alignent pour justifier cette attente commune d’une intervention divine en Haïti. Outre la foi comme un pilier dans la construction et la consolidation de cette attente, les récits bibliques sur les interventions miraculeuses de Dieu dans l’histoire humaine, particulièrement dans les sphères politiques et sociales en faveur de ceux qui ont crié à Lui, constituent autant de raisons d’espérer, de croire, d’être confiant en une intervention divine. D’ailleurs Dieu est reconnu comme étant Celui qui renverse et qui établit des chefs d’États. Daniel 2:21« C’est lui qui change les temps et les circonstances, qui renverse et établit les rois… » Ainsi donc, beaucoup s’appuie sur Dieu pour changer Haïti.

« C’est lui qui change les temps et les circonstances, qui renverse et établit les rois… »

Il semblerait que l’attente d’une intervention divine pour Haïti, en référence aux récits bibliques, repose sur une compréhension biaisée ou une mauvaise application des textes bibliques. Pourquoi ? Parce que les interventions de Dieu, dans la Politique – c’est-à-dire dans l’administration de l’État – se produisaient dans un contexte de monolâtrie et de théocratie, où l’on se retrouve entre une royauté monolâtrique et une monolâtrie royale. Dans ce système, les prophètes – acceptés et reconnus comme tels – servaient de médiums divino-humains dans l’administration de l’État. Lorsque cela était nécessaire, Dieu faisait connaître sa volonté aux chefs de l’État et donnait des directives à travers ces prophètes.  Samuel, Élie, Élysée, Ésaïe, Jérémie, prophètes en Israël et en Juda, sont du nombre.

Dans le contexte d’Haïti nous ne sommes pas dans une forme de pouvoir théocratique, encore moins nous ne sommes pas un État religieux, où Dieu serait consulté dans la prise des décisions par l’État. Nous sommes un État laïque, qui n’est ni monolâtrique ni monothéiste, et ce n’est pas Dieu le Chef de l’État. Cela est clair dans la Constitution qui nous dirige, et cela n’a jamais été formellement contesté par aucun groupe religieux. Si Dieu n’est pas le chef de l’État, il ne lui revient pas de décider pour le pays.

Nous sommes un État laïque, qui n’est ni monolâtrique ni monothéiste, et ce n’est pas Dieu le Chef de l’État.

En substance, ce que l’on réclame de Dieu, c’est l’établissement d’un système juste et équitable, où le pacte social est doux et léger, où chacun est protégé. Or, depuis l’ère chrétienne, il est difficile d’affirmer que Dieu soit intervenu, de manière visible ou par oracle, dans la politique des nations pour modifier un système en particulier. Pourquoi le ferait-il pour Haïti ? Certes, Dieu n’est pas lié à un protocole d’intervention qui le limite dans ses actions dans l’Humanité, mais nous ne trouvons aucun exemple historique d’une intervention politique de Dieu après l’ère biblique.

Toutefois, il peut toujours, à travers ses serviteurs, inspirer certaines décisions, chez des leaders, dans un objectif précis. À titre d’exemples nous pouvons citer des personnalités politiques telles, Frédéric III de Saxe, Édouard VI d’Angleterre, Guillaume d’Orange (1533-1584), les Pères fondateurs des États-Unis, et bien d’autres, ils ont tous été influencés par des réformateurs religieux. Et leurs décisions, entre autres, ont permis une large accessibilité à la Bible et l’extension de la Liberté Religieuse.

Plus d’un diraient que Dieu a intervenu dans la Politique des nations d’autrefois. Nous ne pouvons pas ignorer les interventions apparentes de Dieu dans la politique des nations dans l’Antiquité. Les interventions sont dites apparentes, car elles ne concernaient pas ces nations en elles-mêmes, mais étaient liées au peuple d’Israël. Qu’il s’agisse des antédiluviens, des habitants de Sodome et Gomorrhe, des Assyriens, des Amalécites ou des Ninivites, tous avaient un lien avec Israël. C’est ce qui explique les interventions de Dieu. 

Si on s’arrête dans un premier degré, on conclura que ces peuples et nations étaient un moyen dans le plan divin, apparemment la finalité était Israël. Mais, si on avance dans un second degré on constatera qu’Israël était aussi un moyen, la finalité était la mission. Israël avait une mission, c’était d’exercer un sacerdoce pour les autres nations – Exode 19:6 – « Vous serez pour moi un royaume de prêtres et une nation sainte. » D’autres passages expliquent leur responsabilité dans cette mission de prêtrise. Il faut souligner que le concept de jugement est intimement lié à cette mission.

Ayant échoué, la mission a été transférée à tous ceux qui croient en Jésus-Christ, c’est-à-dire au peuple de Dieu dans son ensemble – 1 Pierre 2:9 – « Vous, au contraire, vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis. » Dès lors, toute éventuelle intervention divine dans la politique humaine s’articulerait autour de la mission et du peuple porteur de cette mission. Notez toujours le concept « jugement » à côté du mot mission. Et, qu’en est-il du peuple porteur de la mission ?

[…] toute éventuelle intervention divine dans la politique humaine s’articulerait autour de la mission et du peuple porteur de cette mission.

Dès l’instruction de la mission, le peuple missionnaire savait que les choses seraient difficiles, ils étaient informés sur le contexte du déroulement de la mission. Le bonheur et la stabilité ne leur étaient pas promis dans ce monde. Certains d’entre eux devaient, doivent et devront connaitre des moments difficiles, et même la mort. Nulle part dans la Bible il n’est promis que Dieu fera une quelconque intervention dans la politique humaine. La seule intervention promise c’est l’établissement d’un autre royaume – Daniel 2.44 : Dans le temps de ces rois, le Dieu des cieux suscitera un royaume qui ne sera jamais détruit, et qui ne passera point sous la domination d’un autre peuple ; il brisera et anéantira tous ces royaumes-là, et lui-même subsistera éternellement.

Nulle part dans la Bible il n’est promis que Dieu fera une quelconque intervention dans la politique humaine.

Si aucune intervention n’est promise, une certitude demeure : Dieu est avec nous. Matthieu 28:20 – « Je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde. » La présence de Dieu n’implique pas l’absence de troubles, mais plutôt un appel à ne pas avoir peur.  S’il y a une chose à laquelle nous devons nous attacher en ces temps troublés en Haïti, c’est la crainte de l’Éternel.  Psaume 34:8 « L’Éternel campe autour de ceux qui le craignent. » Psaume 33:18, 19 – « L’Éternel fait vivre ceux qui le craignent au milieu de la famine. »

S’il y a une chose à laquelle nous devons nous attacher en ces temps troublés en Haïti, c’est la crainte de l’Éternel. 

La Bible définit ce que c’est la crainte de l’Éternel : La crainte de l’Éternel c’est la haine du mal (Proverbes 8:13). L’Écriture démontre que la haine du mal est indissociable de l’amour de la Justice, un amour en actes. Amos 5:15 – « Haïssez le mal, aimez le bien, et faites régner la justice à la porte… » Hébreux 1:9 –  « Tu as aimé la justice et tu as haï le mal… »

L’Écriture démontre que la haine du mal est indissociable de l’amour de la Justice, un amour en actes.

En ce qui concerne nos attentes, c’est décevant pour certains de le dire, mais, c’est la vérité. Dieu n’interviendra pas directement dans la politique. Il a fixé un jour de jugement pour rétablir le droit et la justice, non pas pour un pays en particulier, mais pour le monde entier.  2 Pierre 3:13 – « nous attendons, selon sa promesse, de nouveaux cieux et une nouvelle terre, où la justice habitera. » 

Dans l’histoire biblique, les deux incendies du Temple de Jérusalem, les exils, les déportations, toutes les calamités, c’était une invitation pour le peuple à lutter pour la justice, à pratiquer la justice. Ce n’est quand le peuple était revenu sur les voies de la Justice qu’ils aient connu la paix. Aujourd’hui nos lieux de culte vandalisés, pillés et incendiés, les exils des églises dans des maisons, les déportations vers les autres lieux de culte, les calamités sont une invitation pour nous à rechercher la justice, comme au temps biblique.

Ainsi donc, il revient à nous, citoyens de la terre et du ciel, de travailler activement pour le Droit et la justice dans notre pays. Dieu ne le fera pas à notre place. Considérant tout cela, nous sommes appelés non pas à prier pour que Dieu change Haïti, mais pour qu’il nous inspire des initiatives justes et efficaces. 

[…] il revient à nous, citoyens de la terre et du ciel, de travailler activement pour le Droit et la justice dans notre pays. Dieu ne le fera pas à notre place.

Proverbes 31.8 – Toi, tu dois parler pour ceux qui n’ont pas la parole. Tu dois prendre la défense de ceux qu’on abandonne. Esaïe 1.17 Apprenez à faire le bien, efforcez-vous d’agir avec droiture, assistez l’opprimé, et défendez le droit |de l’orphelin, plaidez la cause de la veuve !


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